Lorris-en-Gâtinais (1974)

lorris_buffet

Composition des jeux
Manuel
48 notes sans premier Ut#
Pédale par tirasse
14 notes
Montre 8'
Bourdon 8'
Prestant 4'
Nazard 2 2/3
Doublette 2'
Tierce 1 3/5
Fourniture 3 rgs
Cymbale 2 rgs
Trompette 8' (basse et dessus)
Voix humaine 8' (basse et dessus)
Dessus de cornet 5 rgsTremblant doux

La date supposée de la création de l’orgue de Lorris serait 1501. Cette date n’a toutefois pas pu être confirmée par les sources d’archives. Elle semble toutefois cohérente avec les caractéristiques architecturales et les décors sculptés du buffet et de la tribune.
Un document datant de 1681 a pu être retrouvé : il s’agit d’un contrat de réparation de l’orgue, auquel est annexé un mémoire des travaux à réaliser. On suppose que l’orgue a été transformé plus tôt au XVIIe siècle car ce mémoire de 1681 décrit l’orgue dans sa disposition actuelle, qui correspond plus à un instrument du XVIIe siècle qu’à un orgue de style Renaissance.
Les documents d’archives indiquent que l’orgue a été régulièrement entretenu et utilisé au courant du XIXe siècle. L’évenement marquant pour l’histoire de l’orgue se situe à la fin de l’année 1893 : d’après la légende, l’organiste n’ayant pas supporté de se voir évincé au profit d’un autre organiste pour la messe de Noël, aurait crevé de nombreux tuyaux à coups de couteau, rendant l’orgue inutilisable. De fait, à compter de cette date, l’orgue est entré dans une phase de sommeil qui a duré près de 80 ans. Paradoxalement, cette mise en sommeil a permis à l’orgue de Lorris d’échapper à une transformation radicale dans un style sympphonique et de conserver intacts tous les éléments anciens.

La tribune et le buffet sont classés dès 1903 au titre des Monuments Historiques. En 1940, Orléans et sa région ont subi des bombardements, ce qui a causé de nouveaux dommages à l’orgue.
Il a donc fallu attendre l’arrivée de Michel Chausson comme prêtre à Lorris pour que l’orgue sorte de la léthargie dans laquelle il avait été plongée. En 1968, Michel Chausson découvrit ainsi plus de 400 tuyaux sous les gravats – restes des bombardements de 1940. En 1971, la partie instrumentale de l’orgue a été classée au titre des Monuments Historiques.
Les travaux de restauration pouvaient dès lors commencer. Notre manufacture, qui s’était fait connaître par la restauration de l’orgue de Sarre-Union suivant les préceptes de Dom Bedos, a été choisie pour restaurer cet instrument. Nous sommes intervenus à partir de 1972.

Il fallait d’abord comprendre cet instrument pour pouvoir le restaurer de la façon la plus respectueuse possible. Nous avons remarqué la présence de nombreux tracés anciens sur le buffet ainsi qu’une trace d’anciens tirants de registre à l’italienne sur la console. Les faux-sommiers présentaient des noircissements localisés, dus au réemploi de douelles de tonneau. De nombreuses pièces provenant du sommier avaient été réutilisées dans la partie mécanique. Les anciens soufflets avaient été réutilisés dans le plancher de la chambre de la soufflerie. Par ailleurs, la tuyauterie comportait une part importante de plomb, et ce dans tous les jeux, alors qu’on s’attendrait à trouver un alliage à 95% d’étain pour la Montre, la Doublette, le Prestant et le Plein Jeu. Des analyses ont permis de mettre en évidence la présence de deux alliages pour les tuyaux, correspondant à deux époques différentes.

Quelques photos de l’orgue :

Avant notre intervention, le sommier présentait un défaut de planéité de plus de 5 cm. Les soupapes étaient recouvertes de gravats et les tuyaux complètement aplatis ou tordus.

Quelques photos avant restauration :

A l’époque de la restauration de l’orgue de Lorris, on aurait plutôt eu tendance à reconstruire de nouveaux tuyaux en copie des anciens, compte tenu de l’état dans lequel ces derniers se trouvaient. Nous avons à l’inverse pris le parti novateur de garder le maximum d’éléments d’origine et de restaurer toute la tuyauterie. Pour cela, il a fallu remettre les tuyaux en forme, procéder à des comblements, chercher une résine adaptée à la restauration de tuyaux en métal poreux. Une fois cette opération effectuée, des essais à la bouche ont été réalisés afin de trouver la note ; avant de pouvoir enfin replacer les tuyaux sur les sommiers, en fonction de la note obtenue.
Malgré tout, il manquait des tuyaux, que nous avons donc reconstruits en copie des anciens : le métal a été coulé sur une toile ancienne afin d’obtenir la même trame, le rabotage s’est fait à la vache, selon les techniques traditionnelles.
Le sommier a pu être redressé par humidification et mise sous presse, permettant, là encore, de garder le maximum d’éléments anciens. La mécanique et les claviers ont été restaurés. La soufflerie a pu être reconstituée à parti des éléments retrouvés dans le plancher.

A l’issue de ce long et passionnant travail de restauration, l’orgue de Lorris a été inauguré le 23 novembre 1975 avec Marie-Claire Alain et Michel Chapuis.

La restauration de la partie instrumentale a été suivie, en 1976, par la reconstruction du décor du buffet.

Quelques photos après restauration :